Construire pour les plus âgés

Nos ressources / Nicolas

La France a une population vieillissante. Ce défi démographique nécessite de repenser notre façon d’habiter. Plus grande accessibilité et adaptabilité des bâtiments, prise en compte de nouveaux usages… des architectes ont déjà commencé à réfléchir à ce sujet.

 

Couple de senior devant leur maison – crédits : Monkey Business

 

Les personnes de 60 ans et plus sont plus de 15 millions aujourd’hui en France. Ce chiffre atteindra les 20 millions en 2020 et jusqu’à 24 millions en 2060. A cette date, pas moins de 12 millions de personnes auront 75 ans ou plus.

 

Cette tendance démographique lourde implique de revoir en profondeur le mode de vie des séniors. Et en premier lieu, il s’agit de repenser l’habitat pour offrir un maximum d’autonomie et de confort.

 

Dans nos sociétés modernes, la prise en charge des personnes âgées par leur famille n’est plus la norme. En meilleur santé, plus indépendants, les séniors le réclament eux-même, ils veulent rester chez eux le plus longtemps possible. Les retraités sont par ailleurs à 82 % propriétaires de leur résidence principale en France.

 

Dans ces conditions, le secteur du bâtiment et de la construction est appelé à s’adapter rapidement.

L’accessibilité au cœur du débat

La loi ELAN de fin 2018 a revu l’obligation de 100 % d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite (PMR) dans les constructions neuves pour la ramener à 20 %, le reste devenant « évolutif ».

 

Crédits : Andrey Popov

 

Certains y voient un vrai recul, d’autres une approche plus réaliste et pragmatique.

 

L’obligation 100 % accessible aux PMR prévoyait déjà des exceptions et concrètement sur 100 logements neufs construits, seuls 40 étaient réellement accessibles. Avec la loi ELAN, ce chiffre serait ramené à 4 selon la Fédération Nationale des accidentés du travail et des handicapés (Fnath) !

 

C’est que les normes d’accessibilités représentent un coût important (5 à 10 % du prix de vente) et imposent un aménagement compact des logements. Les couloirs, cuisines, salles de bain et toilettes sont surdimensionnés pour permettre l’usage d’un fauteuil roulant.

Cela réduit d’autant les autres pièces de vie et rend les logements moins intéressants pour des habitants plus jeunes.

Une niche en pleine expansion

 

Avant même la loi ELAN, les maisons individuelles neuves occupées par le propriétaire étaient exemptées des normes d’accessibilité. Néanmoins les constructeurs sont de plus en plus nombreux à proposer des projets spécialement conçus pour les seniors. Un marché en plein boom avec une clientèle qui veut anticiper pour garantir son autonomie.

 

Plusieurs entreprises proposent déjà des maisons spécial senior comme Trecobat ou encore Auton’home en France. En Allemagne, où le vieillissement de la population est encore plus marqué, WeberHaus est à la pointe sur cette niche.

 

Dans tous les cas, les entreprises insistent sur les aspects personnalisables, modulables et évolutifs de leurs offres. Il s’agit de répondre aux attentes des clients et aux problèmes spécifiques de chacun.

 

 

 

Les maisons de Auton’home présentent un design  classique mais fourmillent de détails pour rendre la vie plus facile.

 

Couloirs optimisés pour un fauteuil roulant, espaces dégagés et sans angles saillants ou encore portes à galandages. Interfaces intérieur/extérieur adaptées, cuisines repensées et luminosité accrue, tout est envisagé pour offrir un confort de vie maximum.

 

 

Maison EbenLeben de WeberHaus

 

WeberHaus propose de son côté une maison de plain-pied spécial senior, elle aussi, adaptable à la perte progressive de mobilité.

 

Avec un design moderne et épuré et une belle clarté garantie par de large baies vitrées, la « EbenLeben » pourra séduire un public néanmoins plutôt haut de gamme.

Faire évoluer le bâti existant

Le vrai challenge reste cependant de transformer l’existant. Déjà majoritairement propriétaires occupants de leur logement, les seniors d’aujourd’hui vont surtout devoir faire évoluer leur propre logement.

 

Crédits : ake1150

 

En effet, selon l’Agence nationale pour l’habitat (Anah) seul 6 % des logements du parc existant sont adaptés à la perte d’autonomie des personnes âgées.

 

Si il ne sera pas toujours possible d’adapter totalement un logement, des travaux d’aménagements peuvent considérablement allonger la possibilité de rester « chez soi ».

 

Salle de bain mal conçue, escaliers glissants sont souvent à l’origine d’accidents. Ces derniers vont souvent rendre impossible l’usage d’une habitation par la suite. Le plus simple consiste donc à les éviter. L’installation d’une rampe, d’un marquage antidérapant ou d’un simple spot lumineux peut changer la donne. Et cela sans représenter un coût trop important.

 

Une étude de l’Anah en 2015 estime à  6500 euros le coût moyen d’une adaptation de logement à la perte d’autonomie. Si on ajoute des travaux de rénovation énergétique, l’enveloppe passe tout de même entre 17000 et 20000 euros. Mais avec une bonne isolation et ventilation, il sera beaucoup plus facile de faire face à une canicule par exemple.

 

Pour les artisans du bâtiment, cette nécessité d’adaptation des logements représente une belle opportunité. D’autant qu’elle implique généralement des prestations « sur mesure » avec un haut niveau qualitatif. Il existe deux labels spécialisés sur l’accessibilité en France à ce jour, Handibat et Pro de l’accessibilité.

 

De son côté, l’État propose un soutien financier pour la réalisation de travaux d’adaptation ainsi qu’un annuaire spécial « SilverEco » où peuvent s’inscrire les entrepreneurs spécialisés.

 

Bon à savoir : retrouver les informations sur les aides possibles pour l’adaptation des logements ici

 

Phénomène démographique de fond, le vieillissement impose de revoir les pratiques dans la construction et d’anticiper les solutions. Les opportunités sont cependant bien réelles et à long terme puisque nous sommes tous concernés par ces enjeux.

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